Dans le cadre du Festival itinérant
des Cheminements littéraires en Bourbonnais
Plume & enclume 2019
Matière à réflexion... Documentation de la préparation !
La correspondance entre Guillaumin et Montusès dans les travaux d'André SEREZAT...
Des échanges épistolaires...
Montusès voit le monde paysan...
Avec l'entremise de Jean-Charles VARENNES
Dans l'introduction des "Harpes de fer", second volume de "C'était hier en Bourbonnais", Jean-Charles VARENNES livre en quelques pages les clés de la rencontre d'Emile GUILLAUMIN et d'Ernest MONTUSES dont nous portons la mémoire dans l'édition 2019 de "Plume & enclume". Sans jamais citer Montusès dans son ouvrage, Varennes livre en miroir la vision de la campagne paysanne de Guillaumin qui a son pendant dans la ville ouvrière que peint Montusès dans l’Âge de fer...
Introduction de « C’était hier en Bourbonnais 1850-1914. Les Harpes de fer » de Jean-Charles VARENNES – Editions du Parc Horvath.
..."
INTRODUCTION
« Le Bourbonnais, symbole de l’unité française », telle est la définition que donna de cette province le plus illustre de ses archivistes, Max Fazy.
Le Bourbonnais n’est ni l`Auvergne, ni la Bourgogne, ni le Berry, ni le Velay, encore moins la Marche dont le regard est tourné vers le Limousin. C`est la « vérité de La Palice », du nom du fameux maréchal de La Palice qui garde son château et sa famille au cœur du département de l’Allier. A chacun de ses voisins le Bourbonnais a su ne prendre que les qualités : la ténacité à l’Auvergnat, la chaleur au Bourguignon, la mentalité secrète au Berry, la pensée passionnée des Vellaves, la solidité mentale des Marchoix. Cette diversité trouve son unité dans ce personnage qu’on accuse de porter un habit de velours sur un ventre de son, en fait un réaliste à l'esprit tourné vers l’avenir soucieux de mettre les valeurs spirituelles au-dessus des plaisirs gastronomiques, même s’il ne dédaigne pas un « lièvre à la Duchambais ».
Formé par la volonté et l`acharnement d’une famille dont l`arbre généalogique immense porte sur ses branches les principaux rois de France et d'Europe, mais dont la première graine est le petit viguier de Châtel-Denoeuvre, cette province a une personnalité propre du fait de sa situation de passage, de lieu de rencontre. Sans unité géographique : son relief varie de 160 m à 1 293 m, les cours d’eau ne font que la traverser, il n`existe pas un type bourbonnais proprement dit, mais une âme bourbonnaise en partie formée par le XIXe siècle. Ce n’est pas sans raisons que cette région donna son premier maire socialiste au monde et ce n’est pas simple hasard si le premier roman paysan écrit par un paysan le fut sur son sol.
La vie d 'un simple paraît en 1904. L’auteur, Emile Guillaumin, dédie son œuvre « à la mémoire des vieillards familiers de mon enfance dont les souvenirs touchants, caustiques ou douloureux se lient à mes premières impressions et observations ».
Dès sa publication, et pendant plusieurs armées, ce livre servira de référence : il sera cité à la tribune de la Chambre des députés ; il amènera un débat sur le métayage et les fermiers généraux qui avaient instauré dans l’Allier une forme très particulière de l’exploitation des terres. Son auteur sera accusé par les gros propriétaires terriens de mettre en danger la paix sociale, il se défendra avec fermeté et lucidité, témoignant de la prise de conscience de la classe paysanne devant l`évolution de la civilisation :
« La paix sociale, voilà ce que vous voulez à tout prix. Mais la paix sociale, il faut le dire bien fort, n’est qu'une façade derrière laquelle s'abritent des iniquités sans nombre. Quand tous les travailleurs sont humblement courbés sur la tâche quotidienne, quand rien ne trouble l’ordre des choses établi, quand les privilégiés jouissent en toute sécurité de leurs privilèges, quand les parasites malins peuvent à loisir lever tribut sur les travailleurs naïfs, c’est la paix sociale. On peut dire aussi que c’est le chaos... Ce que nous vous reprochons, Messieurs, c'est que, reconnaissant l`injustice, vous limitez les remèdes pour la combattre ; c`est que l`on sent percer sous votre plan de réformes, votre vif désir de garder intacts les privilèges que le sort vous a donnés. »
Ces lignes d'Emile Guillaumin, parues dans Le Travailleur rural, témoignent sur l’évolution de la conscience sociale et de la vie quotidienne en Bourbonnais au moment où parait La vie d 'un simple, une œuvre qui a racines dans le passé mais rayonne sur le présent et l’avenir. Ce temps est celui où l'histoire perd sa vitesse de croisière maintenue depuis plus de trois siècles : en 1804, en 1850, en 1900, Anne de Bourbon, la bonne duchesse, aurait pu parcourir les campagnes de Moulins à Chantelle, de Chantelle à Montluçon, sans éprouver une trop grande stupéfaction. Le même voyage, effectué en 1914, l`aurait conduite d'étonnements en étonnements, au sens initial de ce mot. En effet, pendant cette période, tout s’est mis en place pour un nouvel art de vivre. Le métayage, tel qu`il était pratiqué, paraissait remonter au Moyen Age ; dans la préface de la réédition de La vie d 'un simple, en livre de Poche, Jean- Louis Curtis écrit justement :
« Le livre de Guillaumin recompose avec une admirable précision de détails la physionomie physique, sociale et morale d'une province immobile, en marge de l’histoire dont le mouvement ne s’est pas encore accéléré. La société qu’il dépeint, si proche de la nôtre (nos grands-parents l’ont connue) nous surprend par son archaïsme. C`est un peu comme si nous lisions une chronique des temps mérovingiens. Les paysans ne possèdent pas le sol d'où ils tirent si durement leur subsistance. Métayers exploités par les propriétaires, à demi-serfs encore par la résignation, le conservatisme obtus, la soumission respectueuse au Maître et au Curé, leur existence toujours précaire, toujours menacée, est vraiment réduite à son expression la plus primitive, il s’agit seulement de survivre. Insécurité devant la maladie et l`accident du travail, absence presque totale de loisirs, ignorance et superstition, c'est la figure même de l’HOMME aliéné. »
La période où Emile Guillaumin publie son livre est celle de la prise de conscience de leur situation véritable par les exploités aussi bien à la ville qu’à la campagne et dans cette révélation le Bourbonnais apparaît comme le lieu privilégié d`une mutation fondamentale de la vie quotidienne : les conditions d’existence y modifieront profondément l`art de vivre, l`art de penser, donc l’art d`être HOMME. Au moment où les paysans luttent pour la juste rétribution de leur peine et veulent que la terre profite non seulement à celui qui la possède mais aussi à celui qui la cultive, dans la forêt de Tronçais se développent les syndicats forestiers et à Montluçon Jean Dormoy entraîne la population ouvrière à l`action.
A cette époque, le boucher de Charroux passe de maison en maison avec une hotte dans laquelle il transporte sa viande, la Mariette, bien que risquant la contravention, propose des allumettes de contrebande, le fabricant de jougs passe avec sa scie, sa hachette et sa plane pour transformer le madrier d’orme ou de frêne bien sec que les cultivateurs ont toujours en réserve, tandis que le vitrier annonce son passage en criant : « Vitri-i, vitri-i ! ». Au même moment, à Rochebut des ingénieurs barrent le Cher afin d'alimenter en eau le canal du duc de Berry pendant l' été, mais aussi afin de faire tourner les turbines d'une usine destinée à produire de “l`électricité".
Quand s'éteignent les échos du XIXe siècle, tout ce qui va faire le XXe siècle est en place. La vie d’un simple découvre ce passé à travers les « metteurs en scène de l`avenir ». Toute l’œuvre d’Emile Guillaumin, de Rose et sa parisienne au Syndicat de Baugignoux en passant par Baptiste et sa femme, révèle l'envers du décor de la Belle Epoque et font connaître dans sa dure vérité un temps que vécurent nos proches ancêtres de la fin du Premier Empire à la douloureuse guerre de 1914/18 - La Grande Guerre - celle qui frappa les trois coups tragiques de l`accélération de l’histoire. Et ces images d'hier que montrent les pages suivantes, expliquent les fruits aujourd’hui- Nous devons cette récolte aux efforts de nos anciens : en particulier à ceux qui vécurent sur la terre bourbonnaise. Ils nous donnent un exemple à méditer afin d`ajouter l’efficacité à cette lutte qui fait les lendemains plus beaux.
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INTRODUCTION
« Le Bourbonnais, symbole de l’unité française », telle est la définition que donna de cette province le plus illustre de ses archivistes, Max Fazy.
Le Bourbonnais n’est ni l`Auvergne, ni la Bourgogne, ni le Berry, ni le Velay, encore moins la Marche dont le regard est tourné vers le Limousin. C`est la « vérité de La Palice », du nom du fameux maréchal de La Palice qui garde son château et sa famille au cœur du département de l’Allier. A chacun de ses voisins le Bourbonnais a su ne prendre que les qualités : la ténacité à l’Auvergnat, la chaleur au Bourguignon, la mentalité secrète au Berry, la pensée passionnée des Vellaves, la solidité mentale des Marchoix. Cette diversité trouve son unité dans ce personnage qu’on accuse de porter un habit de velours sur un ventre de son, en fait un réaliste à l'esprit tourné vers l’avenir soucieux de mettre les valeurs spirituelles au-dessus des plaisirs gastronomiques, même s’il ne dédaigne pas un « lièvre à la Duchambais ».
Formé par la volonté et l`acharnement d’une famille dont l`arbre généalogique immense porte sur ses branches les principaux rois de France et d'Europe, mais dont la première graine est le petit viguier de Châtel-Denoeuvre, cette province a une personnalité propre du fait de sa situation de passage, de lieu de rencontre. Sans unité géographique : son relief varie de 160 m à 1 293 m, les cours d’eau ne font que la traverser, il n`existe pas un type bourbonnais proprement dit, mais une âme bourbonnaise en partie formée par le XIXe siècle. Ce n’est pas sans raisons que cette région donna son premier maire socialiste au monde et ce n’est pas simple hasard si le premier roman paysan écrit par un paysan le fut sur son sol.
La vie d 'un simple paraît en 1904. L’auteur, Emile Guillaumin, dédie son œuvre « à la mémoire des vieillards familiers de mon enfance dont les souvenirs touchants, caustiques ou douloureux se lient à mes premières impressions et observations ».
Dès sa publication, et pendant plusieurs armées, ce livre servira de référence : il sera cité à la tribune de la Chambre des députés ; il amènera un débat sur le métayage et les fermiers généraux qui avaient instauré dans l’Allier une forme très particulière de l’exploitation des terres. Son auteur sera accusé par les gros propriétaires terriens de mettre en danger la paix sociale, il se défendra avec fermeté et lucidité, témoignant de la prise de conscience de la classe paysanne devant l`évolution de la civilisation :
« La paix sociale, voilà ce que vous voulez à tout prix. Mais la paix sociale, il faut le dire bien fort, n’est qu'une façade derrière laquelle s'abritent des iniquités sans nombre. Quand tous les travailleurs sont humblement courbés sur la tâche quotidienne, quand rien ne trouble l’ordre des choses établi, quand les privilégiés jouissent en toute sécurité de leurs privilèges, quand les parasites malins peuvent à loisir lever tribut sur les travailleurs naïfs, c’est la paix sociale. On peut dire aussi que c’est le chaos... Ce que nous vous reprochons, Messieurs, c'est que, reconnaissant l`injustice, vous limitez les remèdes pour la combattre ; c`est que l`on sent percer sous votre plan de réformes, votre vif désir de garder intacts les privilèges que le sort vous a donnés. »
Ces lignes d'Emile Guillaumin, parues dans Le Travailleur rural, témoignent sur l’évolution de la conscience sociale et de la vie quotidienne en Bourbonnais au moment où parait La vie d 'un simple, une œuvre qui a racines dans le passé mais rayonne sur le présent et l’avenir. Ce temps est celui où l'histoire perd sa vitesse de croisière maintenue depuis plus de trois siècles : en 1804, en 1850, en 1900, Anne de Bourbon, la bonne duchesse, aurait pu parcourir les campagnes de Moulins à Chantelle, de Chantelle à Montluçon, sans éprouver une trop grande stupéfaction. Le même voyage, effectué en 1914, l`aurait conduite d'étonnements en étonnements, au sens initial de ce mot. En effet, pendant cette période, tout s’est mis en place pour un nouvel art de vivre. Le métayage, tel qu`il était pratiqué, paraissait remonter au Moyen Age ; dans la préface de la réédition de La vie d 'un simple, en livre de Poche, Jean- Louis Curtis écrit justement :
« Le livre de Guillaumin recompose avec une admirable précision de détails la physionomie physique, sociale et morale d'une province immobile, en marge de l’histoire dont le mouvement ne s’est pas encore accéléré. La société qu’il dépeint, si proche de la nôtre (nos grands-parents l’ont connue) nous surprend par son archaïsme. C`est un peu comme si nous lisions une chronique des temps mérovingiens. Les paysans ne possèdent pas le sol d'où ils tirent si durement leur subsistance. Métayers exploités par les propriétaires, à demi-serfs encore par la résignation, le conservatisme obtus, la soumission respectueuse au Maître et au Curé, leur existence toujours précaire, toujours menacée, est vraiment réduite à son expression la plus primitive, il s’agit seulement de survivre. Insécurité devant la maladie et l`accident du travail, absence presque totale de loisirs, ignorance et superstition, c'est la figure même de l’HOMME aliéné. »
La période où Emile Guillaumin publie son livre est celle de la prise de conscience de leur situation véritable par les exploités aussi bien à la ville qu’à la campagne et dans cette révélation le Bourbonnais apparaît comme le lieu privilégié d`une mutation fondamentale de la vie quotidienne : les conditions d’existence y modifieront profondément l`art de vivre, l`art de penser, donc l’art d`être HOMME. Au moment où les paysans luttent pour la juste rétribution de leur peine et veulent que la terre profite non seulement à celui qui la possède mais aussi à celui qui la cultive, dans la forêt de Tronçais se développent les syndicats forestiers et à Montluçon Jean Dormoy entraîne la population ouvrière à l`action.
A cette époque, le boucher de Charroux passe de maison en maison avec une hotte dans laquelle il transporte sa viande, la Mariette, bien que risquant la contravention, propose des allumettes de contrebande, le fabricant de jougs passe avec sa scie, sa hachette et sa plane pour transformer le madrier d’orme ou de frêne bien sec que les cultivateurs ont toujours en réserve, tandis que le vitrier annonce son passage en criant : « Vitri-i, vitri-i ! ». Au même moment, à Rochebut des ingénieurs barrent le Cher afin d'alimenter en eau le canal du duc de Berry pendant l' été, mais aussi afin de faire tourner les turbines d'une usine destinée à produire de “l`électricité".
Quand s'éteignent les échos du XIXe siècle, tout ce qui va faire le XXe siècle est en place. La vie d’un simple découvre ce passé à travers les « metteurs en scène de l`avenir ». Toute l’œuvre d’Emile Guillaumin, de Rose et sa parisienne au Syndicat de Baugignoux en passant par Baptiste et sa femme, révèle l'envers du décor de la Belle Epoque et font connaître dans sa dure vérité un temps que vécurent nos proches ancêtres de la fin du Premier Empire à la douloureuse guerre de 1914/18 - La Grande Guerre - celle qui frappa les trois coups tragiques de l`accélération de l’histoire. Et ces images d'hier que montrent les pages suivantes, expliquent les fruits aujourd’hui- Nous devons cette récolte aux efforts de nos anciens : en particulier à ceux qui vécurent sur la terre bourbonnaise. Ils nous donnent un exemple à méditer afin d`ajouter l’efficacité à cette lutte qui fait les lendemains plus beaux.
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Un projet d'exposition temporaire pour le Musée Emile Guillaumin... |
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Le temps en images...
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Numérisation Universités de Toronto et Ottawa 2010
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